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L’histoire de la Dow : la bière qui tua 20 personnes

Il arrive parfois qu’une situation ou un événement vienne briser le lien de confiance établi entre une marque et le public. Dans cet épisode, je vous raconte l’histoire de la Dow, une bière québécoise qui vu ses parts de marché fondre comme neige au soleil après avoir causé la mort d’une vingtaine de personnes. Bonne écoute!

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Description de l’épisode

Peu de gens de mon âge se rappellent de la bière Dow. Pourtant, cette dernière a fait partie du paysage québécois pendant de nombreuses années. À tel point qu’au début des années 1960, ses parts de marché atteignaient 51% à travers la province. Pour la capitale nationale, ce chiffre atteignait 85%.

À son apogée, la brasserie Dow, qui employait plus de 1 000 personnes dans ses installations de Montréal et Québec, vendait plus que ses concurrentes Molson et O’Keefe réunies.

L’entreprise innovait constamment. Elle profita par exemple de la vague nationaliste pour lancer la Kébec, laquelle était présentée comme « la bière au goût du Québec moderne ». Rien ne semblait pouvoir freiner son ascension, du moins jusqu’au milieu des années 1960.

La bière Dow

La bière Dow cause la mort de 20 personnes

Entre les mois d’août 1965 et avril 1966, près de cinquante personnes de Québec se présentent aux urgences. Ces dernières souffrent d’une cardiomyopathie inhabituelle. Vingt en décéderont. Les autorités vont rapidement établir un lien entre les patients. Ce sont tous de gros buveurs de bière, la plupart consommant plus de six litres par jour.

La population ignorait tout de cette histoire jusqu’au samedi 26 mars 1966 où La Presse titra à la une de son quotidien : « Ottawa enquête à Québec sur la mort étrange d’une quinzaine de personnes ». L’article précisait que les victimes consommaient de grandes quantités de bière, sans toutefois incriminer une compagnie en particulier.

Les journalistes de divers médias vont commencer à spéculer sur la cause des décès dans les jours suivants, notamment en faisant référence à un enzyme qui aurait été ajouté à la bière pour la faire mousser. On note également une confusion quant au nombre de victimes, certains médias allant jusqu’à avancer qu’il y aurait eu une centaine de décès.

Le gouvernement s’en même

Le mercredi 30 mars 1966, Éric Kierans, alors ministre provincial de la Santé, fit une déclaration ministérielle. Ce dernier indiqua qu’un médecin de la ville de Québec avait émis la possibilité d’une relation de cause à effet entre une consommation excessive de bière et une forme particulière de myocardose.

Il ajouta qu’une brasserie avait fait l’objet d’une inspection rigoureuse et que rien n’indiquait qu’il y avait eu contamination de la bière. Les différentes enquêtes allaient se poursuivre : au laboratoire des aliments et drogues, à Ottawa, dans les laboratoires du ministère de la Santé, à Montréal, ainsi qu’au laboratoire de médecine légale du ministère de la Justice du Québec.

La bière Dow est retirée du marché

Les dirigeants de la brasserie Dow prennent une décision radicale dès le lendemain. Ils annoncent qu’ils retirent du marché toutes les bières produites à Québec. Ils ajoutent que les Québécois boiront la bière produite à Montréal en attendant qu’on identifie la cause du mal qui afflige les victimes.

On retire les bières des restaurants, hôtels, épiceries, tavernes et établissements détenant un permis de boisson. Les consommateurs de la région sont quant à eux invités à retourner les produits en leur possession en échange d’un remboursement.

La tâche est colossale. L’entreprise va jusqu’à fabriquer un outil capable de retirer cinq bouchons de bière à la fois afin d’accélérer le processus. On estime la quantité de bière retirée du marché à 500 000 gallons. À titre indicatif, une piscine olympique contient 660 000 gallons d’eau. Et tout ce liquide se retrouvera dans le fleuve St-Laurent.

La bière Dow n’est plus la bienvenue dans les foyers 

Les dirigeants de la brasserie Dow croyaient bien faire en agissant de la sorte. Leur décision est cependant mal perçue par la population qui y voit plutôt un aveu de culpabilité. Le lien de confiance est brisé, et ce, malgré les rapports d’enquête officielle qui concluent à l’absence de lien établi entre les produits de la brasserie et les décès.

La chute est brutale pour l’entreprise québécoise qui sera achetée par O’keefe en 1967. Bien que ses parts de marché aient fondu comme neige au soleil, la bière Dow survivra à la transaction, allant même jusqu’à rempoter des prix internationaux en 1968, 1969 et 1970. Elle sera finalement retirée du marché en 1998, alors qu’elle ne compte plus que quelques fidèles.

Le sulfate de cobalt mis en cause

Contrairement à ce qu’ont avancé les médias de l’époque, ce ne serait pas un enzyme ajouté à la bière qui serait en cause dans cette histoire, mais bien le sulfate de cobalt. Ce produit est très néfaste en cas de carence alimentaire, car il reste alors prisonnier dans le corps et endommage le cœur de manière irréversible.

Plusieurs brasseries de l’époque utilisaient ce produit à titre expérimental pour faire mousser leur bière. Dans le cas de la Dow, il n’est pas exclu qu’il y ait eu un important surdosage dans les installations de Québec. Certains ont avancé que la quantité de sulfate de cobalt aurait été 16 fois plus importante que dans les autres bières, un chiffre qui n’a jamais été confirmé par les responsables de l’époque. 

Cette théorie semble valable, car aucun cas n’à été rapporté une fois la production de Québec arrêtée. À titre informatif, le sulfate de cobalt est aujourd’hui interdit dans la production de bière.

Pour en savoir plus, je vous invite à regarder ce reportage produit par Radio-Canada :

Sources :

La drôle d’histoire du Québec et de sa bière, lesoleil.com, 21 juin 2017
Le mythe de la bière Dow, Société d’histoire de Coaticook
Le mystère de la Dow, le Journal de Montréal, 22 mai 2011

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